Apprentissages numériques de l’école au collège : enjeux, difficultés, évolutions


Intervention de Roland Charnay,
membre du groupe d'experts pour les programmes de l'école primaire
et du groupe « Sciences » pour les programmes de collège
aux journées IG-IPR de mathématiques 18 mars 2004 - IUFM de Lyon)

 

Présentation

1 Les nombres et leurs désignations

2. Le calcul

3. La résolution de problèmes

Annexe

 

Présentation

Je situerai aujourd’hui plutôt mon intervention à l’articulation de l’école et du collège, dans le but de préciser la responsabilité de l’école et du collège (notamment des premières années du collège) vis-à-vis des apprentissages numériques à partir de trois réflexions :

 les enjeux de ces apprentissages sur l’ensemble de la scolarité obligatoire ;

 les connaissances attendues des élèves au terme de l’école primaire tels que les définissent les programmes actuels ;

 les difficultés constatées, en particulier à partir de l’analyse des évaluations à l’entrée en Sixième.

Le champ recouvert par l’intitulé « Apprentissages numériques » est très vaste. La proposition actuelle concernant les programmes de collège adopte un découpage très voisin de celui de l’école primaire de façon à mieux faire apparaître les continuités, à les rendre plus lisibles pour les enseignants.

 

Cycle 3 de l’école primaire

Collège

Exploitation de données numériques

Organisation et gestion de données, fonctions

Connaissance des nombres entiers naturels

Nombres et calcul

Connaissance des fractions simples et des nombres décimaux

Calcul

Espace et géométrie

Géométrie

Grandeurs et mesure

Grandeurs et mesure

 

Tous les domaines, même la géométrie, sont concernés par l’utilisation des nombres.

Je n’aborderai pas tous ces domaines et me limiterai à trois points qui ne sont évidemment pas indépendants les uns des autres :

1. L’apprentissage des nombres et de leurs désignations

2. L’apprentissage du calcul

3. La résolution de problèmes impliquant les nombres, avec un intérêt plus particulier pour la proportionnalité.

 

 

1 Les nombres et leurs désignations

À l’issue du collège, ont été travaillés les entiers, les décimaux et les rationnels. Le travail sur les racines carrées entrepris en 3e permet une toute première approche des nombres réels (non rationnels).

Si on regarde cet apprentissage à travers la problématique de l’articulation entre l’école et le collège, on peut dresser le tableau suivant.

 

Entiers naturels

Selon les programmes, les connaissances relatives à la numération décimale et à l’ordre sur ces nombres sont des objectifs de l’école primaire, ce qu’enregistre d’ailleurs le programme de Sixième. Il faut ajouter une première approche de l’arithmétique (connaissance de relations entre nombres d’usages courants inférieurs à 100 et reconnaissance des multiples de 2, 5 et 10).

Ces connaissances ne font pratiquement l’objet d’aucune évaluation spécifique à l’entrée en Sixième, en particulier pour ce qui concerne la signification des écritures chiffrées et la valeur positionnelle des chiffres dans l’écriture d’un nombre entier.

Deux résultats cependant :

La seule question posée en 2000 sur la relation entre dizaines et unités laisse supposer que la maîtrise de la numération en base dix est loin d’être assurée pour tous les élèves à l’entrée en Sixième, ce qui peut expliquer d’autres difficultés avec les nombres décimaux.

Complète l’égalité   25 dizaines = …… unités n’est réussi que par 54 % des élèves

 

 La relation entre désignation orale et désignation chiffrée est relativement bien acquise (80 % à 90 % de réussite, selon la taille des nombres, mais l’écriture en chiffres de trois cent quatre pose encore difficulté pour 10 % des élèves, après quatre années de travail)

 

Décimaux

Selon les programmes, les connaissances relatives à la numération décimale et à l’ordre sur ces nombres sont également des objectifs de l’école primaire, le programme de Sixième proposant d’en reprendre l’étude de façon plus importante que pour les entiers.

Je n’insisterai pas sur les difficultés constatées à l’entrée en Sixième, bien connues et persistantes, et qui montrent que selon les exercices entre un quart et la moitié des élèves rencontrent des difficultés aussi bien sur la compréhension des écritures à virgule que sur les questions relatives à l’ordre.

En observant également les manuels scolaires deux conclusions complémentaires peuvent être tirées :

 du côté de l’école primaire, le travail sur la compréhension des écritures décimales (valeur des chiffres en fonction de leur position, relations entre unités de rangs différents) est insuffisant et laisse trop rapidement la place à la mise en place de techniques ou de questions formelles (repérage du chiffre des dizaines et de celui des unités, par exemple) ;

 du côté du collège, une reprise est nécessaire, sans refaire ce qui a été fait à l’école primaire, mais en sollicitant en permanence la compréhension des écritures décimales… et donc en évitant d’aller trop rapidement vers l’utilisation de techniques non justifiées.

 

Écritures fractionnaires

Ici, les objectifs sont beaucoup plus contrastés entre l’école et le collège.

Les programmes de l’école primaire proposent une approche limitée des fractions, en se bornant à ce qui est nécessaire à la compréhension des nombres décimaux (fractions de dénominateur simple et fractions décimales).

 les fractions sont étudiées avec une seule signification :

  5/3 c’est 5 fois 1/3 (5 fois la part obtenue en partageant l’unité en 3)

 à partir de là, sont travaillées, par le biais du raisonnement, sans mise au point de techniques :

- la relation avec 1 : 3/3 c’est 1, donc 5/3 est supérieur à 1 (rôle important de l’oral et des images mentales issues des manipulations préalables) ;

- la décomposition en nombre entier et fraction inférieure à 1 : 19/3 c’est 6 fois 3/3 plus 1/3, donc 6 + 1/3.

Ces connaissances sont peu évaluées à l’entrée en Sixième

Alors qu’elle occupe une place limitée à l’école primaire, l’écriture fractionnaire va prendre une place centrale au collège : c’est un des outils essentiels pour le traitement de nombreux problèmes, comme on le verra pour la proportionnalité et comme on pourrait le montrer pour les grandeurs quotients. Plusieurs questions se posent aux élèves et donc aux enseignants :

 L’écriture fractionnaire prend une nouvelle signification, celle de quotient : 7/3 c’est le tiers de 7.

 Il faut donc que les élèves aient conscience de ces deux significations, tout en s’assurant de leur équivalence : 7 fois le tiers de 1 c’est pareil que le tiers de 7 (trop souvent cette équivalence est passée sous silence, n’est pas travaillée et les deux conceptions cohabitent mal) [i] .

 Cette écriture représente un nombre… et non un calcul à effectuer. L’élève fait un pas important vers l’idée de nombre lorsqu’il accepte cela, comme ce sera également le cas avec les nombres relatifs, puis avec les radicaux. L’usage excessif des calculatrices qui incite à tout ramener à des « nombres en ligne » n’y aide pas.

 Elle nécessite le passage à une conception plus théorique : au cycle 3, la fraction est reliée au fractionnement effectif d’une grandeur ; en sixième 7/3 est le nombre qui multiplié par 3 donne 7 – ce passage du pratique au théorique peut être source de difficultés pour certains.

 Interviennent également des nombres décimaux au numérateur ou au dénominateur… et l’idée de partage devient plus difficile à évoquer pour les élèves…

 

Évolution de la notion de nombre au cours de la scolarité

Pour conclure, sur l’apprentissage des nombres au cours de la scolarité obligatoire, je ferai deux remarques ou, si on veut, deux suggestions :

 un temps insuffisant est consacré à travailler la compréhension, le sens au profit d’un travail sur le vocabulaire et sur les techniques ;

 un peu comme au cours de l’histoire, l’idée que l’élève se fait de ce qu’est un nombre doit évoluer :

 le passage des entiers naturels aux décimaux suppose de renoncer à l’idée de nombres qui se suivent et d’accepter que le processus d’intercalation soit sans fin…

 le passage aux fractions quotients suppose d’accepter qu’un nombre ne s’exprime pas nécessairement par une suite de chiffres ;

 le passage aux négatifs suppose de renoncer au fait qu’un nombre exprime une quantité ou une la mesure d’une grandeur.

 

Une synthèse sur les nombres est prévue en fin de collège, avec une ouverture sur les irrationnels, mais c’est tout au long de la scolarité obligatoire que ces évolutions qui sont aussi des ruptures devraient être prises en compte.

 

 

2. Le calcul

Deux questions

Le fait que les moyens de calcul numérique se soient profondément modifiés dans les pratiques quotidiennes, dans les pratiques professionnelles ou dans les pratiques scientifiques ne peut qu’interroger la place et le rôle donnés à l’apprentissage des différents moyens de calculer. Deux questions :

 Quels sont les besoins en calcul du futur acteur social et professionnel ?

 Quels sont les besoins en calcul pour l’apprentissage des mathématiques ?

 

Apprendre à calculer

Apprendre à calculer comporte différentes facettes :

 c’est d’abord apprendre à rendre calculables des situations par un travail de modélisation (cf. résolution de problèmes) ;

 c’est évidemment aussi apprendre à traiter des calculs, de façon automatisée ou raisonnée, pour aboutir à un résultat exact ou approché ;

 c’est aussi apprendre à organiser, à « programmer » un calcul pour le rendre exécutable par une machine (cf. initiation à l’usage du tableur au collège).

 

Quel calcul ?

Le tableau suivant offre un cadre permettant de penser les différents moyens de traiter un calcul :

 

Calcul automatique

Calcul réfléchi ou raisonné

Résultat exact

Résultat approché

Calcul essentiellement mental

Résultats mémorisés

Procédures automatisées

Procédures construites ou reconstruites

choix des arrondis

Calcul papier-crayon

Techniques opératoires

(calcul posé)

Procédures construites ou reconstruites

choix des arrondis

Calcul machine

calculs usuels

Ex : division euclidienne avec calculatrice ordinaire

 

 

Les programmes actuels, depuis le cycle 2 de l’école primaire, prévoient l’apprentissage et l’utilisation de ces trois moyens de calcul. Mais on constate, à l’école primaire :

 une confusion entre calcul et calcul posé, ce dernier occupant l’essentiel des activités ;

 une pratique insuffisante du calcul mental ;

 une résistance des enseignants, voir un refus, vis-à-vis de l’utilisation des calculatrices.

 

Les priorités définies dans les programmes

Les programmes définissent clairement les priorités (qui sont en rupture avec des pratiques fréquemment en usage dans les classes), en les justifiant et ces justifications valent sans doute pour le collège. En résumant :

 

Le calcul mental

Le calcul mental est la priorité des priorités pour au moins six raisons :

 c’est un calcul d’usage, utile dans la vie ordinaire ;

 aucun calcul écrit ne peut être effectué sans une disponibilité suffisante de résultats connus ou obtenus mentalement : les erreurs dans la multiplication posée sont plus souvent dues à des erreurs « de table » qu’à des erreurs « de décalage » (près de 15 % des élèves, à l’entrée en Sixième) ;

 le calcul mental est le moyen privilégié pour contrôler un résultat obtenu par un autre moyen ;

 le calcul mental réfléchi ou raisonné qui nécessite l’élaboration de stratégies de calcul personnelles met en jeu l’initiative, le raisonnement et des connaissances implicites ou explicites sur la numération et les propriétés des opérations c’est le lieu principal d’établissement de relations entre calcul et raisonnement ;

 le calcul mental joue un rôle important dans l’appropriation de nouvelles connaissances, que l’on songe par exemple à la perception rapide de rapports entre les nombres dans le cas de la proportionnalité, de la simplification de fractions ou de la factorisation d’expressions algébriques simples : le calcul mental est ainsi une aide à la conceptualisation ; et on peut penser qu’un déficit de compétences dans ce domaine constitue un handicap majeur pour de nombreux élèves à l’entrée au collège ;

 se ramener à un cas calculable mentalement est souvent un bon moyen d’avancer dans la résolution d’un problème.

 

Le travail sur les techniques opératoires

Le travail sur les techniques opératoires doit être recentré dans deux directions :

 on vise une bonne maîtrise dans des cas dits « simples » évitant à l’individu de devenir esclave de la machine ;

 on insiste sur le travail de compréhension (de justification) de ces techniques qui permet d’enrichir les connaissances mathématiques des élèves sur la numération et sur les propriétés des opérations.

 

L'apprentissage du calcul assisté par une machine

L’apprentissage du calcul assisté par une machine comporte quatre aspects :

 l’utilisation d’une machine doit être contrôlée (c’est-à-dire sollicitée à bon escient et avec un contrôle des résultats obtenus) ;

 dans la résolution de problèmes, l’usage de la calculatrice est une aide (par exemple pour explorer un phénomène numérique ou pour les élèves qui ont des faiblesses en calcul, en leur permettant d’avoir malgré tout accès à une activité mathématique), mais son utilisation nécessite une organisation particulière des calculs dont il faut également penser à conserver une trace ;

 certaines de ses fonctionnalités nécessitent un apprentissage spécifique ou peuvent en faire l’objet (facteurs constants, mémoire) ;

 elle peut être source de problèmes intéressants, par exemple comment calculer 247 x 39 avec la machine, sans utiliser la touche [ x ].

Le cadre proposé pour l’école primaire peut sans doute trouver des prolongements tout au long de la scolarité au collège. Certains IREM ont d’ailleurs entrepris des travaux sur une utilisation plus importante et organisée du calcul mental.

 

Apprentissage du calcul au primaire

Quelles opérations ont été travaillées à l’école primaire (sens et moyens de calcul) ?

Ce tableau résume la situation (nouveaux programmes) :

 

Entiers naturels

Décimaux

addition

Depuis le cycle 2

 sens

 calcul mental et calcul posé

Fin du cycle 3

 sens

 calcul mental et calcul posé

soustraction

Depuis le cycle 2

 sens

 calcul mental

Depuis le début du cycle 3

 calcul posé

Fin du cycle 3

 sens

 calcul mental et calcul posé

multiplication

Depuis le cycle 2

 sens

 calcul mental

Depuis le début du cycle 3

 calcul posé

Fin du cycle 3 : multiplication d’un décimal par un entier

 sens

 calcul mental et calcul posé

Collège

Produit de 2 décimaux (sens et calculs)

division

Cycle 3 : division euclidienne

 sens

 calcul mental

 calcul posé

Collège

Quotient décimal de 2 entiers et quotient de 2 décimaux (sens et calculs)

 

L'extension du calcul aux décimaux suppose des restructurations de compétences

L’extension du calcul à de nouveaux nombres (décimaux, puis fractions et relatifs) ne s’opère pas en simple prolongement des significations établies antérieurement. Elle suppose le plus souvent des remises en cause et donc des restructurations de connaissances établies.

Pour la multiplication ou la division par un décimal, la question du sens doit faire l’objet d’une attention particulière : par exemple, au cycle 3, l’idée de multiplication est attachée à celle d’addition itérée et au mot « fois »… Ce qui est difficilement extensible au cas du produit par un décimal : itérer 3,5 fois se conçoit encore ; 2,048 fois plus difficilement et 0,706 fois encore plus difficilement.

L’utilisation de cette nouvelle multiplication dans des situations doit donc être justifiée… Elle nécessite un recours à la proportionnalité, par exemple :

Pour calculer le prix de 0,706 kg de gruyère à 9,85 € le kg, il est possible de considérer qu’on achète 7/10 de kg et 8/1000 de kg (la signification des fractions comme un dixième de kg pris 7 fois justifie la multiplication) ou que si on calcule 9,85 x 706, on a le prix de 706 kg et qu’en divisant par 1 000, on a celui de 0,706 kg (ce qui rejoint la justification de la technique… et montre que travail sur le sens et travail sur la technique vont souvent de pair)…

 

De même, des théorèmes implicites qui ont fonctionné durant une partie importante de la scolarité comme « la multiplication agrandit » et « la division diminue » doivent être remis en cause.

L’enseignement doit être attentif à ces restructurations nécessaires et en faire des enjeux d’apprentissage.

 

Les compétences en calcul mental à l’entrée en Sixième

La maîtrise des tables et de ce qui doit être mémorisé n’est pas ou peu évaluée en tant que telle, mais on sait que celle des tables de multiplication n’est pas complète pour tous les élèves, notamment sous ses différents aspects :

 donner un produit ;

 donner un facteur d’un produit ;

 donner les décompositions d’un nombre sous forme de produits.

On peut relever qu’un résultat comme le quart de 100 n’est connu ou rapidement retrouvé que par 67 % des élèves (entrée en Sixième, 2000).

Concernant le calcul réfléchi (recherche de résultats exacts), les résultats sont contrastés.

En 2002

198 + 10

est réussi

par 84 % des élèves

405 – 10

 

par 81 %

47 + 33

 

par 86 %

60 – 19

 

seulement par 67 %

 

En 2000, 

52 : 4

n’était réussi que par 35 %

Lorsque des nombres décimaux sont en jeu, comme résultats ou dans les calculs, les résultats sont moins bons.

En 2002

37 : 10

est réussi

par 56 % des élèves (par seulement 42 % en 2003, année au cours de laquelle les résultats sont en baisse générale – mouvement du printemps 2003 ?)

3 fois 0,5

 

par 46 %

1,7 + 2,3

 

par 64 %

2,5 x 4

 

par 49 %

 

Le calcul approché fait l’objet d’une première approche à l’école primaire. Il est déstabilisant pour les élèves dans la mesure où, pour chaque calcul, des résultats différents sont considérés comme acceptables. Enfin ce calcul ne doit pas être développé pour lui-même, mais dans des situations qui correspondent à ses fonctions principales :

 fournir une estimation, suffisante dans certaines situations dans lesquelles la réponse exacte n’est pas nécessaire ;

 permettre des anticipations ;

 être utilisé comme moyen de contrôle d’un résultat obtenu « à la main » ou avec une machine.

 

Conclusion : l’entraînement au calcul mental sous ses 2 formes (mémorisé et réfléchi) et ses deux types de résultats (exacts et approchés) doit impérativement être poursuivi de façon régulière au collège. En particulier, se pose la question des résultats dont la mémorisation doit être entretenue et de ceux, nouveaux, dont la mémorisation est utile (carrés, racines carrées, puissances de nombres simples…)

 

Concernant le calcul posé

Il n’est pas évalué en 2002 et 2003.

En 2000 et 2001, les résultats montrent que l’addition et la soustraction sont calculées correctement par 80 % à 90 % pour les entiers et par 60 % à 80 % pour les décimaux.

La multiplication sur les entiers pose davantage problème : 64 x 39 n’est réussi que par 54 % des élèves (2001) et 523 x 305 par 61 % (2000) – les tables sont plus difficiles dans le 1er calcul que dans le 2e

Pour la division, il faut remonter aux évaluations de 1999 qui montrent de grands écarts selon la difficulté des calculs :

73 : 3 est réussie par 76 % des élèves alors que 2782 : 3 ne l’est que par 44 %.

 

Conclusion

1) Le calcul posé, dans des cas raisonnables, doit donc continuer à être entraîné au collège, notamment pour la multiplication et la division.

2) Si on ne veut pas accroître les difficultés il faut doser ce que l’on demande de calculer « à la main » et ce que l’on permet de calculer « à la machine ».

 

 

3. La résolution de problèmes

Prise en compte du long terme et évolution des procédures de résolution

On peut difficilement envisager la question du calcul sans évoquer la résolution de problèmes. Le calcul peut être un objet d’étude, mais le plus souvent il intervient comme outil pour traiter des situations (rapport avec le réel, avec d’autres disciplines et, plus particulièrement, avec la mesure des grandeurs).

J’ai déjà évoqué la question de ce qu’on a coutume d’appeler le « sens des opérations », en soulignant que ce sens était à reconstruire lorsque de nouveaux nombres interviennent. Les travaux de Gérard Vergnaud ont montré que, même si on se limite à l’opération la plus élémentaire (l’addition), la maîtrise des problèmes dans lesquels cette opération intervient comme moyen de résolution s’opère sur une très longue période temps.

Exemple

(entrée en Sixième 1994) :

Lucie aime jouer aux billes. A la fin de la journée, elle a 8 billes de plus que le matin.

Pourtant la journée avait mal commencé : à midi, elle avait perdu 2 billes !

Que s’est-il passé l’après-midi ?

                                               21 %

Proposé à des élèves de l’école primaire, la résolution de ce problème nécessite la mise en œuvre d’un raisonnement, par exemple : L’après-midi, elle a dû regagner les 2 perdues le matin, puis encore 8 autres, donc en gagner 10.

Proposé plus tard, il peut être modélisé et résolu à l’aide nombres relatifs …

(-2) + … = (+8), puis résolution par raisonnement ou par essai

et, plus tard encore, en utilisant une mise en équation : (-2) + x = (+8), puis résolution.

Je m’attacherai plutôt à un constat et une tentative d’analyse qui peuvent déboucher sur des perspectives pour l’enseignement.

 

Le constat et l’analyse

Il nous est fourni, de façon constante, par toutes les évaluations (françaises ou internationales) : la résolution de problèmes est le principal lieu de difficulté pour nos élèves… alors que c’est l’enjeu principal de notre enseignement.

Deux exemples suffisent à caractériser les difficultés rencontrées.

Exemple 1

Les images (résultat 2003)

Xavier range les 50 photos de ses dernières vacances dans un classeur.

Chaque page contient 6 photos.

a) Combien y aura-t-il de pages complètes ?

b) Combien y a-t-il de photos sur la page incomplète ?

 

Il y a .......... pages complètes :               54 %

Il y a .......... photos sur la page incomplète :  57 %

Ce résultat est très faible compte tenu des connaissances que les élèves peuvent mobiliser pour le résoudre :

 schéma et dénombrement ;

 addition itérée ;

 essais de produits ;

 division.

Il montre ce que confirme l’observation des productions : le fait que les élèves n’utilisent pas tout ce qu’ils savent pour affronter un problème. Résoudre un problème, c’est plus écrire un calcul… que chercher la solution, éventuellement par des moyens non experts. Au-delà des difficultés de lecture ou de la maîtrise du sens des opérations, c’est l’autonomie des élèves face à ce type d’activité qui paraît en cause.

 

Exemple 2

Raisonnement (résultat 2000)

Sophie a dessiné et colorié trois étiquettes rectangulaires toutes identiques sur une plaque de carton, comme le montre le dessin. La plaque est rectangulaire et a pour longueur 12 cm et pour largeur 10 cm.

 

         

a) Calcule la longueur réelle d’une étiquette. Écris tes calculs.   44 %

b) Calcule la largeur réelle d’une étiquette. Écris tes calculs.      23 %

 

  22 % des élèves ont mesuré.

 

Trois difficultés :

 la notion de schéma,

 le fait qu’une mesure puisse être obtenue par un calcul et non par un mesurage,

 la capacité à opérer des déductions, donc à raisonner.

 

Pistes de travail

Ce qui fournit deux pistes de travail pour le primaire et le début du collège :

 inciter les élèves à initier des procédures de résolution originales, personnelles (cf. programme du primaire) lorsque la solution experte n’est pas connue ou pas reconnue par l’élève (le problème ne doit pas toujours être un problème d’application des connaissances du chapitre !) ;

 travailler la capacité à déduire et à résoudre certains problèmes en articulant différentes étapes par un raisonnement approprié.

 

Le cas de la proportionnalité à l’articulation de l’école et du collège

À l'école primaire, la proportionnalité n’est pas étudiée pour elle-même.

Les élèves sont confrontés à des problèmes qu’ils résolvent en utilisant des raisonnements appuyés implicitement sur des propriétés de la proportionnalité :

 les propriétés de linéarité sont celles qui sont le plus souvent utilisées : idée de "fois plus" (si j'achète trois fois plus d'objets, je paierai une somme trois fois plus importante...) ;

 le passage par l’image de l’unité ;

 le coefficient de proportionnalité est également utilisé, en particulier dans le cas où est mise en jeu une relation entre grandeurs de même nature : mélanges (cinq fois plus d'eau que de sirop), agrandissement ou réduction de figures et échelles (les dimensions sur le papier sont cent fois plus petites que dans la réalité).

Des situations où ces types de raisonnement ne fonctionnent pas sont également proposées (situations de non proportionnalité).

La notion de proportionnalité, à la fin de l'école primaire, est donc liée au fonctionnement de certains types de raisonnements contextualisés, appuyés sur l’une des deux propriétés précédentes.

Dans cette optique, la reconnaissance d’une situation de proportionnalité n’est pas préalable à sa résolution : elle intervient au cours même de son traitement.

Exemple

Prendre 20 % de 350.

 

1

     Pour 100 fabriqués à 20 vendus

     Pour 100 fabriqués à 20 vendus

     Pour 100 fabriqués à 20 vendus

     Pour 300 fabriqués à 60 vendus

     Pour 50 fabriqués à 10 vendus

     Pour 350 fabriqués à 70 vendus

 

2

     Pour 100 fabriqués à 20 vendus

     Pour 300 fabriqués à 60 vendus (3 fois plus)

     Pour 50 fabriqués à 10 vendus (la moitié)

     Pour 350 fabriqués à 70 vendus

 

3

     Le nombre de pains vendus, c'est 1/5 du nombre de pains fabriqués (ou 5 fois moins)

     1/5 de 350, c'est 70

 

Au collège, les procédures de résolution évoluent au fur et à mesure que progressent les connaissances numériques des élèves. On se limite ici à mettre en évidence l’évolution des procédures de résolution.

Sixième

Traiter les problèmes « de proportionnalité », en utilisant des raisonnements appropriés, en particulier :

 passage par l’image de l’unité

 utilisation d’un rapport de linéarité, exprimé sous forme de quotient

 utilisation du coefficient de proportionnalité, exprimé sous forme de quotient

Appliquer un taux de pourcentage : méthode « experte »

Les différentes propriétés n’ont pas à être formalisées.

Les rapports utilisés sont, soit des rapports entiers ou décimaux simples (2,5 par exemple qui peut être exprimé par « 2 fois et demie »), soit des rapports exprimés sous forme de quotient : le prix de 7 m de tissu est 7/3 fois le prix de 3 m de tissu

 

Cinquième

Procédures

 Utilisation plus systématique des quotients

 Utilisation de tableaux de nombres

 Première approche graphique

 calcul d’un pourcentage (méthode « experte »)

 

Quatrième

 caractérisation graphique

 produit en croix (en lien avec égalité de quotients)

 

Troisième

 modélisation par une fonction linéaire

Il faut y ajouter différents domaines où la proportionnalité permet de rendre compte du phénomène étudié : Thalès, trigonométrie, agrandissement et réduction de figures…

 


[i] On peut le montrer : partages et reports effectifs ; le « vivre », notamment dans le cas des fractions inférieures à 1 : deux façons de répartir équitablement 3 tartes rectangulaires entre 7 personnes ; on peut aussi le prouver, plus difficilement : 1/3 pris 3 fois c’est 1, donc 7 fois 1/3 reporté 3 fois c’est 7 (qui est la nouvelle définition de 7/3)

 

 

Annexe

On trouvera à la page http://www.eduscol.education.fr/index.php?./D0048/primacc.htm du site Eduscol quelques documents de référence pour un travail sur l’articulation école-collège. Ils font partie du dossier "Les nouveaux programmes à l'école primaire"

 Articulation école-collège (PDF, 163 Ko)

 Calcul mental (PDF, 262 Ko)

 Utiliser les calculatrices en classe (cycles 2 et 3) (PDF, 254 Ko)

 Le calcul posé (PDF, 303 Ko)

 Les problèmes pour chercher (PDF, 302 Ko)

 Vers les mathématiques-maternelle (PDF, 292 Ko)