Descartes et Leibniz : controverse |
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Culture Michel Mendès France Professeur émérite - Université Bordeaux 1 n°18, mai 2002 |
Le premier affirmait dans ses Principes (1644) que dans un système
mécanique isolé, la quantité de mouvement
était invariante dans le temps et, en particulier, avant et après d’éventuels
chocs élastiques. Je cite : « Que Dieu est la première cause du mouvement,
et qu’il en conserve toujours une égale quantité en l’univers. » (Seconde
partie, Des principes des choses matérielles, principe 36).
Leibniz, quant à lui, défendait avec ardeur que c’était l’énergie
cinétique
qui restait constante (texte manuscrit de 1678 « De concursu corporum »).
Il faut aussi citer son mémoire paru dans Acta Eruditorum Leipzig 1686 dont
le titre mérite d’être reproduit en entier : « Démonstration courte
d’une erreur considérable de M. Descartes et de quelques autres touchant une
loi de la nature selon laquelle ils soutiennent que Dieu conserve dans la matière
la même quantité de mouvement, de quoi ils abusent dans la mécanique ».
Ouf ! Dès lors une hostilité féroce s’engage entre Leibniz d’une part et les cartésiens d’autre part (Descartes est mort en 1650, bien avant la parution de l’article).
Le comique de la situation est qu’ils avaient tous deux raison dans le cas d’un choc élastique : la quantité de mouvement et l’énergie cinétique sont conservées ! Cette double invariance a une conséquence remarquable. Imaginez deux boules de billard A et B de même masse m qui se déplacent sans frottement sur un plan horizontal. Initialement, la boule A se dirige à la vitesse (sans « spin ») vers la boule B. Après le choc, les deux boules ont pour vitesses respectives .
On a donc :
On en déduit que le triangle formé par les deux vecteurs est rectangle. Donc, après le choc, les deux boules se déplacent sur des trajectoires orthogonales. Ceci inclut bien sûr le cas où A frappe B de plein fouet : après le choc .
Sujet de devoir : décrire les têtes de Descartes et Leibniz jouant au billard ensemble.