Larithmétique, qui revient dans nos programmes, traite des objets les plus simples des mathématiques : les nombres entiers. Il est donc naturel que les mathématiques les plus antiques aient eu affaire à elle. Égyptiens et Babyloniens se trouvèrent, comme nous allons le voir, confrontés à des questions de divisibilité, mais ils ne théorisèrent pas cette notion.
Les scribes de lÉgypte pharaonique ne savaient penser les rationnels quen tant que sommes dinverses dentiers distincts (Cf RéciproqueS n° 5 page 3). Se posait alors le problème décrire le double dun inverse dentier (soit 2 x 1/n) sous la forme dune somme dinverses. k étant un entier, ils essayaient de compléter 1/(kn) pour arriver à 2/n. La différence étant : (2k1)/(kn), ils nétaient satisfaits que lorsque cette fraction était un inverse dentier. Ceci équivaut, pour nous, à : 2k1 divise kn et donc : 2k1 divise n.
Lorsque n est premier, ceci implique 2k1 = n, et donc la décomposition égyptienne revient à : 2 x 1/(2k1) = 1/k + 1/[k(2k1)]. Par exemple : 2 x 1/31 = 1/16 + 1/496. Dans le cas où n = 35 (non premier), ils écrivaient, avec 2k1 = 5 : 2 x 1/35 = 1/105 + 1/21.
Les anciens Babyloniens rencontrèrent eux aussi la divisibilité, sans la nommer. Ils savaient en effet quels diviseurs fournissaient une division "qui sarrête" dans leur système de numération de base 60.
Avec nos concepts actuels, n et d étant premiers entre eux, n/d sexprime en base 60 si et seulement si n/d est de la forme N/60p donc si et seulement si : n.60p = N.d, ssi d divise 60p, pour un certain entier p. Ceci équivaut au fait que les seuls diviseurs premiers de d se trouvent parmi ceux de 60, à savoir parmi 2, 3 et 5.
Les Babyloniens jouissaient donc dun plus grand nombre de divisions "tombant juste", puisque dans notre système décimal, les seuls diviseurs premiers permis du dénominateur sont 2 et 5, et non plus 3.
En contraste avec ces calculateurs, dailleurs souvent virtuoses, les anciens Grecs eurent limmense mérite délaborer une mathématique qui fût théorie, conceptualisation, déduction et logique. Un de leurs premiers résultats est cependant négatif, et sema semble-t-il le trouble chez les Pythagoriciens : en notre langage, racine(2) nest pas rationnel. (Car si p2 = 2q2, p et q étant premiers entre eux, on a impérativement p et q pairs et p et q ne sont donc pas premiers entre eux ! On trouve cette démonstration chez Aristote).
Surmontant leur perplexité, les Grecs dégagent les concepts fondamentaux de larithmétique : Nombres premiers, PPCM, PGCD, algorithme dEuclide Certaines notions gardent cependant la trace de la valeur mystique que les Pythagoriciens attribuaient au nombre entier. Ainsi un nombre est dit parfait sil est égal à la somme de ses diviseurs propres (lui-même exclu, bien sûr). Deux nombres sont dits amiables si la somme des diviseurs propres de chacun dentre eux est égale à lautre. Euclide démontre que si 2n1 est premier, alors P = 2n-1 (2n1) est un nombre parfait. Cest Euler qui montra que les seuls nombres parfaits pairs sont ceux dEuclide. On ne sait pas sil en existe des impairs.
Les Arabes du IXème siècle reprennent avec passion les travaux des Grecs, et Thâbit Ibn Qurra (mort en 901) donne des nombres amiables sous la forme a = 2n pn pn-1 et b = 2n qn où pn = 3.2 n1 et qn = 9.22n-11, sous la condition que pn, pn-1 et qn soient tous les trois premiers, ce qui est une proposition passablement complexe. Voici deux exemples de paires amiables : {220, 284} et {17 296, 18 416}.
Les Arabes énoncent aussi le théorème "de Wilson", et des résultats sur les fonctions "nombre de diviseurs", "somme des diviseurs", qui seront retrouvés par les Européens des XVIIème et XVIIIème siècles, et qui forment le socle de lArithmétique "classique". Mais ceci est une autre histoire