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Le nom d'Euclide désigne finalement plus un livre, Les Éléments, et un style de connaissance, l'exposé axiomatique et déductif, qu'un homme. Il est presque certain qu'Euclide vécut à Alexandrie, en Égypte, sous le règne du roi Ptolémée Ier, avant et après 300 avant Jésus-Christ. Il travailla sans doute au Musée, centre intellectuel de cette ville. Il est plus vieux qu'Archimède et Eratotosthène, de quelques dizaines d'années. Mais on ne connaît presque rien de l'homme, si ce n'est quelques anecdotes peut-être significatives, mais sujettes à caution. On raconte qu'à un de ses élèves débutants, qui lui demandait ce qu'il allait gagner à apprendre cette matière ardue, il fit donner par un de ses esclaves un pièce de monnaie, puisque, dit le maître, ce personnage voulait tirer profit de qu'il apprenait...
Certains historiens doutent même de ce qu'un homme appelé Euclide ait existé, et voient dans ce nom une sorte de nom d'auteur collectif, derrière lequel se seraient cachés plusieurs mathématiciens.
Les Éléments constituent une encyclopédie du savoir mathématique de la civilisation grecque du temps. Mais plus que son contenu, c'est l'organisation de l'ouvrage qui est remarquable. En effet, cette uvre entreprend de déduire l'ensemble des résultats mathématiques à partir d'un petit nombre d'entre eux, explicitement admis. Tous les autres résultats n'apparaissent alors que comme des conséquences des résultats premiers, à l'issue de raisonnements qui se veulent absolument précis et rigoureux. La certitude des théorèmes semble découler alors implacablement de celle des énoncés premiers, et cela sans recours à l'intuition ou à l'évidence sensible, mais par le seul moyen de la démonstration mathématique.
Ce type de présentation, euclidien, est devenu le modèle même de l'exposé mathématique, et à plus de deux millénaires de distance, le groupe Bourbaki de mathématiciens français s'est réclamé d'Euclide pour composer au XXème siècle de nouveaux Éléments de mathématiques, sous une forme elle aussi encyclopédique et parfaitement déductive (combien plus vaste et plus ardue, évidemment). Il est clair que les démonstrations d'Euclide ne pouvaient atteindre à la rigueur parfaite, et qu'elles contiennent de nombreuses approximations qui les invalident. Mais, tel qu'il est, l'uvre et surtout sa conception restent impressionnantes.
Comme le veut sa structure, les éléments commencent, dans le Livre I, par des Définitions, des Demandes ou Postulats, des Notions communes. La fin du Livre I, et les Livres II, III, IV, traitent de géométrie plane. Le Livre V instaure une rupture, et traite des Proportions; cette théorie des proportions est attribuée à Eudoxe. Au XXème siècle, nous y voyons une théorie de l'ensemble R. Le Livre VI est une application de la théorie des proportions à la géométrie (on y trouve par exemple le théorème de Thalès).
Le Livre VII traite d'arithmétique, de ppcm, de pgdc, de nombres premiers... On y trouve décrit l'algorithme d'Euclide. Le Livre VIII traite des nombres en suites géométriques, sous l'angle de la divisibilité, et des rapports entiers ou rationnels. Le Livre IX concerne également l'arithmétique. Le Livre X étudie ce que nous appellerions, en notre langage, la rationnalité d'expressions où figurent des racines carrées. C'est un des plus difficiles des Éléments. Les Livres XI, XII, et XIII traitent de géométrie dans l'espace, le Livre XIII étudiant plus précisément les polyèdres réguliers.
Outre les Éléments, quelques autres ouvrages d'Euclide nous sont parvenus,... avec d'autres, dont il n'est pas l'auteur, mais qui lui étaient traditionnellement attribués.